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jeudi 14 juillet 2016

   Le soleil sous la soie


Eric Marchal
Ed Anne Carrère, 
Pocket


   Je sors un peu étourdie de ce pavé, la tête pleine de connaissances diverses sur la période qui couvre les vingt  dernières années  du règne de Louis XIV.  Certains ont pu écrire que le sujet était essentiellement la chirurgie à cette époque,  or je considère qu’il s’agit du sujet dominant puisque notre héros, Nicolas déruet est un chirurgien compétent pour l’époque,  mais le romancier ne se contente pas de relater des interventions, des soins et de décrire les traitements utilisés à l’époque, il alimente son récit d’intrigues, de discussions entre la couronne de France et le duché de Lorraine, de manœuvres politiques de la part du roi Soleil, comme de Léopold, duc de Lorraine qui se bat pour maintenir l’indépendance de son duché, la Lorraine n’étant pas française à l’époque.

Concernant la médecine, j’ai beaucoup appris, moi qui considérais les médecins de l’époque, ceux dont Molière se moque ouvertement, comme des charlatans, souvent à juste titre. Or il y avait deux sortes de soignants : ceux de « l’Académie » qui n’intervenaient pas chirurgicalement, le rôle de chirurgien étant rabaissé au rang de barbier, bons pour le petit peuple, formés comme on dirait aujourd’hui sur le tas, et les chirurgiens ambulants ou œuvrant dans  des maisons de soin souvent dirigées par les religieuses. Les médecins officiels qui avaient une formation pratiquaient les saignées  autant que faire se peut, ce n’est pas nouveau,  et ne possédaient pas les connaissances d’un chirurgien comme Nicolas Deruet qui timidement,  affirme au début du roman que le sang circule dans les veines,  sans trop insister pour ne pas froisser les éminents médecins du royaume. Il faut dire de Maître Deruet a de la pratique : chirurgie de toute sorte, accouchements, quelques années sur les champs de bataille de Hongrie, 
autopsies …
Il a fallu avoir parfois le cœur bien accroché pour lire les descriptions d’opérations exposées par l’auteur.

Mais Eric Marchal ne se contente pas de la médecine, ça fricote dans le roman! Nicolas Deruet oscille entre  deux amours : Marianne, sage-femme de son état et Rosa,  veuve du Marquis de Cornelli, faisant partie de la suite du duché. Cette situation générera bien des intrigues et des  situations délicates qui entretiennent un suspense relatif.

Je me demande si ce roman avait besoin de ses neuf cents pages ! beaucoup de dilution, de digressions au cours desquelles de nouveaux personnages surviennent, ce qui rend le récit quelque peu lassant. J’ai terminé en ayant vraiment hâte de lire la dernière page. Rien de grandiose dans cette histoire. La première moitié se laisse lire aisément, la deuxième devient parfois très fatigante.

Je suis étonnée qu’un roman si documenté commette des erreurs quant aux relations sociales : l’auteur ne prévoit pas que des amours entre une personne de la haute société et un chirurgien ambulant  puissent se réaliser sans obstacles, qu’un bohémien ait ses entrées au duché, que les amis de Nicolas Deruet deviennent les amis de la marquise sans que l’entourage ne s’offusque... et l'étiquette que diable!


La vie décrite ne semble pas si dure : le duc pardonne aisément, même quand on essaie d’attenter à sa vie,  engage des paris sur les relations amoureuses de Deruet, les amis du chirurgien, chirurgiens eux-mêmes, font figure de joyeux fêtards, le vin coule à profusion, on fait la fête, on souffre parfois, mais on guérit souvent. Diable, à en croire l’écrivain, il faisait bon vivre sous le règne du roi Soleil !


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